dimanche 21 juillet 2013

L'absence de l'ami

Ses yeux ne brillent plus, son regard est vide... Sa bouche est ouverte mais ne respire plus...

On cherche à recueillir son souffle, mais on ne sent rien contre la joue... L'air qu'il semble appeler ne circule plus... On enserre son poignet, le pouls ne bat plus, le pouls est éteint... On ne sait pas si c'est vrai, ou si l'on s'est trompé... On recommence... On scrute sa poitrine qui ne bouge plus...
Alors, on dit « Il est mort »... On se regarde tous, pour mieux se rassurer de notre propre existence, puis on le regarde lui, comme si, l'on n'y croyait pas... Comme si, ce n'était pas possible...
Cela fait une éternité... Peut-être une minute... On regarde l'heure, pour la consigner... Parce qu'il faut que la mort soit consignée, figée pour l'éternité... On se regarde à nouveau, désemparés. Dans nos yeux, on le voit lui, il y a quelques instants... Ses yeux clignaient, sa bouche cherchait la respiration qui manquait à ses poumons envahis par le sang... Il cherchait à nous dire, il cherchait à nous rassurer... Et maintenant, tout est fini...

Son regard nous fait peur. Alors nous fermons ses paupières, pour nous rassurer, pour feindre de croire qu'il s'est endormi. Alors que nous ne pouvons supporter ces yeux qui nous donnent honte d'être encore vivants...

Alors, nous nous agenouillons autour de lui, pendant que le crépitement du combat continue. Nous récitons le « Notre Père », parce qu'on n'en sais pas d'autre, tête baissée... Fermant les yeux, je le revois, vivant... C'était, il y a quelques minutes, qui semblent déjà si lointaines, comme dans un passé irréel... Il donnait ses ordres sous le feu ennemi, et demandait au radio la liaison avec le PC... J'entends encore sa voix précise et assurée...

« Ainsi soit-il » !... Ami fidèle, tu es parti... Ton ombre est passée au dessus de nous...
Nous nous relevons.

Nos cœurs battent très forts, comme est forte notre émotion. Notre douleur est vive... Elle ne nous lâchera plus, jusqu'au dernier jour d'engagement armé...
Elle déclenchera notre haine et assoiffée de vengeance, elle armera nos bras, pour frapper encore et encore...
     

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