samedi 13 février 2021

Mémoires et radotages (332) – Amour et angoisse

 

Écrit le 10 février 2021

Comme je l’avais écrit dans « Mémoires et radotages (297) – Amour et haine, curieuses mathématiques » : « On peut aimer plusieurs personnes sans qu’aucune de ces personnes ne soit moins aimée que les autres, car l’amour se multiplie et s’additionne, sans s’affaiblir. Le malheur de ceux que l’on aime nous empêche d’être heureux. Ce stress vient diminuer le bonheur que l’on a d’être heureux d’aimer ».

Il arrive que ce stress soit de l’inquiétude, de la peur,

Toto était envoyé cette semaine en Allemagne dans une autre usine du groupe pour donner un coup de main, il parait que c’est le bordel, là-bas, rien ne fonctionne correctement… Il avait fini par accepter d’y aller, pas de gaîté de cœur, mais seulement parce que les déplacements à l’étranger étaient prévus sur son contrat d'embauche… et signés par lui…

Il est parti, sans rien de chaud (ni anorak, ni pull, ni duvet, ni couverture, ni gants)… Je lui avais présenté juste avant qu’il parte de chez nous le dimanche, un résumé de la météo Allemande assez glaciale annoncée pour la semaine… Il avait refusé que je lui passe des vêtements chauds et est parti en coup de vent…

Lundi 8 janvier 2021, après avoir récupéré la voiture de location près de son lieu de travail habituel il a donc pris le chemin d’un patelin aux environs de Berlin…

Lundi à 16h30, il a appelé, après avoir franchi la frontière Franco-Belge, puis la frontière Belgo-Allemande pour dire qu’il avait encore 600 km à faire...

Lundi 20h02, SMS : « N’attendez pas un message de ma part pour dire que je suis arrivé de sitôt, parce que je suis bloqué sur l’autoroute et il me reste 400 bornes »

Moi : « Tu es dans un embouteillage ou seul ? »

Toto à 20h07 : « Dans un embouteillage et j’ai pas avancé d’un poil depuis au moins 20mn »

Toto à 20h19 : « Bisous à tout le monde »

………………..

Moi le mardi à 12h21 : « On n’a pas de nouvelle, envoie nous un SMS »

Il est inutile de dire l’état de peur dans lequel nous étions. Une angoisse nous prenait, comme une véritable boule dans le ventre pour ma part. Ma femme a sauté son repas et moi, je ne savais que faire pour essayer de tromper mon angoisse, ma trouille…

Toto le mardi à 13h45 : « Je suis sur un parking, je crois que j’ai un problème de pneu »

Rassurés ? Pas vraiment ! Nous lui avons envoyé une tonne de texto… sans réponses…

Toto le mardi à 16h42 : « Je suis arrivé à l’hôtel, bisous »

D’un coup, notre panique a cessé et nous étions tout à coup sereins, dans une douce quiétude qui était du bonheur à l’état pur, une félicité sans bornes…

En fait il est resté coincé dans cet embouteillage sur l’autoroute allemande pendant 12 heures de 20h à 8h, par un froid de -10°… Il n’avait plus rien à manger, et emporté qu’une seule bouteille d’eau… Heureusement que le moteur tournant, réchauffe (c’est dans ces cas-là qu’il vaut mieux ne pas tomber en panne de carburant)… Neige et chaussée glissante l’ont accompagné jusqu’au bout…

Ensuite il a eu ce problème de pneu… Qui selon moi n’était pas inquiétant, le froid fait baisser la pression dans les pneus et déclenche les détecteurs de pressions… Et le bruit de clac, clac qu’il entendait devait selon moi être le fait des joints transversaux des chaussées béton…

Il n’avait comme je l’avais deviné, pas emporté son chargeur sur allume-cigare et considérant que son mobile n’a pas une grande autonomie… Nous en avons imaginé des scénarios !!!

Bref ! Tout cela pour dire que si la prochaine fois il repart dans ces conditions, nous nous occuperons de tout, tout, tout !... Mais Toto, nous a dit mardi soir au téléphone, qu’il n’était pas question de retourner dans ce pays de sauvages et qu’il préfèrera se faire foutre à la porte !

Reste le retour… La météo Allemande est franchement prévue largement en dessous de zéro, avec neige éventuelle pendant les deux semaines à venir…

Quant nous, les parents : Il reste que, quand on aime, non seulement on s’inquiète, mais on peut éprouver une peur terrible…

A chaque fois que j’ai eu mes peurs les plus fortes, c’est pour l’un ou l’autre de nos enfants. C’est une peur que nous ne contrôlons pas, parce que nous sommes totalement impuissants…

Lorsque j’ai frôlé la mort à plusieurs reprises au cours de ma vie, je n’ai jamais éprouvé cette angoisse, j’ai simplement fait ce qu’il fallait faire pour éviter la mort, ou si je ne pouvais rien contrôler, je me disais que ça y était, que c’était pour cette fois et j’étais résigné…

Que ferais-je donc pour l’amour de mes enfants ? Je trahirais mon pays, je volerais, je tuerais, je me sacrifierais, s’il le fallait…

C’est con l’amour… ça fait souffrir… Quelle drôle de chose que l’amour !

   

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