vendredi 27 octobre 2017

Je ne l'ai jamais raconté, car les gens sont trop cons !

Écrit le 15 novembre 2010

Le 9 novembre 1970, je n'y étais pas bien sûr...

Par contre le 12, j'y étais...

Nous avions fini notre petit déjeuner ce matin-là (ce devait être le 10 novembre) et nous avions emprunté l'allée gravillonnée qui menait à nos salles d'études...
Le sous-directeur de l'école des mines, André Lefebvre, professeur agrégé de mathématiques, nous fit réunir...
Cet ancien résistant avait les yeux rouges...
Il nous dit d'une voix mal assurée (et c'est bien la seule fois où nous le sentîmes désemparé), que cette journée serait une journée de deuil et que tous les cours étaient supprimés.
Nous étions tous consignés dans l'école et pouvions faire ce que bon nous semblait, mais en silence...

Tout remué par ce que je venais d'apprendre la veille aux informations, (le Général était décédé la veille dans sa demeure), j'ai demandé à celui que nous surnommions « Dédé », l'autorisation de me rendre à l'enterrement du Grand Homme... Ce qu'il m'accordât bien volontiers...

Mes collègues de promotion savent cet épisode me concernant... Et me le resservent à chacune de nos retrouvailles... sans moquerie, avec peut-être un peu de respect, bien que de Gaulle, représentât à leurs yeux, un vieux bonhomme du passé secret leur parents... Je partis l'après-midi même en moto...

Je ne pus que m'approcher très loin du petit cimetière de Colombey les deux églises... Ce devait être le lendemain du 11 novembre... Mais beaucoup de larmes inondèrent les chaussées de cette petite bourgade...

Ce que personne ne sait, c'est que la vallée du Rhône était bloquée par la neige cette année là ! Seule l'autoroute A7 était dégagée. Roulant la nuit entière, je suivis un semi-remorque à 110 km/h, pendant des centaines de kilomètres, aspiré par la dépression d'air de son sillage jusqu'à ce que ce que nos chemins se séparent... Heureusement qu'à aucun moment il ne freinât...

À Colombey, je dormis comme je pus, transi de froid, près de ma moto dans un petit bois... Il n'y avait aucune neige...

Après notre hommage et notre recueillement, partagés par des milliers de fidèles de la France combattante et reconnaissante, je repartis pour Alès. Encore par l'autoroute en dessous de Lyon... Il faisait encore plus froid, je n'avais pas de camion pour « m'aspirer », cette fois là... J'ai fini le parcours avec les pieds près du sol tant cela glissait avec le durcissement de la neige...

Épuise, au dernier croisement avant le portail arrière des ateliers de l'école, je me payais de plein front, une voiture dont j'avais refusé la priorité, bien malgré moi d'ailleurs : Je dormais littéralement...
Après le valdingue par-dessus la voiture : Le constat... Et j'arrivais au milieu du repas dans la cantine, épuisé, barbu, sale, en tenue de moto, mon vêtement de pluie en lambeaux... Et acclamé par mes camarades...

Je ne l'ai jamais raconté. Mes enfants le découvriront peut-être un jour dans mes écrits...

Après tout, mon récit de Kolwezi ne les a jamais intéressés, alors, pourquoi leur raconter une si banale aventure ???
   

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire