jeudi 21 mai 2020

Pendant le confinement la sécession territoriale continue



Extraits de propos recueillis par Charlotte d’Ornellas pendant le confinement en avril 2020 auprès des policiers :

Voilà plusieurs semaines que Paul (tous les prénoms ont été changés), commissaire en Seine Saint-Denis, s’applique à faire respecter le confinement, dans son difficile département. Il constate cependant que le relâchement n’est pas moindre quand il rentre le soir à Paris. Dans le détail la comparaison lui semble pourtant difficile à maintenir : «  La différence, c’est que (dans le 93), les jeunes qui jouent au foot, fument dehors, organisent des rodéos ou font vivoter leurs trafics, se contrefoutent de la loi et de ceux qui sont chargés de la faire respecter », confie-t-il dans un soupir.

A Poitiers, par exemple, un policier se désole de la bêtise crasse de cette racaille : « On a essayé de leur expliquer qu’ils risquaient de contaminer leurs proches… Ils s’en tapent. »

Un policier des Yvelines ne sait pas s’il doit rire ou pleurer : « Il y a plein de gens avec qui cela se passe de la même manière en banlieue ! Mais que les bobos viennent observer ce qui arrive si on demande gentiment aux jeunes problématiques de rentrer chez eux. On se fait insulter, cracher dessus et caillasser, ça fait une petite différence dans l’intervention, c’est certain. »

Ce ne sont pas tant les agissements d’une minorité défavorablement connue qui exaspèrent les policiers, que les ordres qu’ils reçoivent.

Cette lâcheté s’est illustrée à l’approche du Ramadan.
C’est d’abord une note du patron de la police du Calvados qui enflamme les réseaux sociaux. Il y invite ses effectifs à ne pas « intervenir dans les quartiers à forte concentration de population suivant le ramadan » pour « éviter qu’un manquement aux règles de confinement ne dégénère et provoque un trouble supérieur de violence urbaines ».

Devant le tollé provoqué par la fuite, le patron de la DGPN a immédiatement désavoué la consigne et demandé un rapport d’explication.. ;

Sur le terrain, certains policiers ont failli s’étouffer : « Il ose faire un démenti alors qu’on a reçu les mêmes ordres au téléphone ! », entame un commissaire de Seine Saint Denis.
Un policier de terrain ne décolère pas : « Le préfet du département et celui de Paris entretiennent leur réputation de gros durs, mais ça dépend des situations apparemment »

« Depuis le début, les instances religieuses appellent au respect du confinement, les mosquées sont fermées, toute une partie de la population respecte les règles et c’est finalement la hiérachie qui baisse son froc sans assumer », lâche sans pincettes un policier.

Un commissaire des Yvelines confie sa fatigue : « On nous met la pression sur les chiffres et nous interdit en même temps d’aller là où sont commises les infractions. On nous a même donné l’ordre d’aller verbaliser dans une enclave très huppée de mon département, tous en appelant poliment à la "mesure" dans les quartiers sensibles, c’est honteux ! »

Les propos de Castaner au Micro de Jean-Jacques Bourdin ne passent pas ! Outre la minimisation des violences, le ministre de l’intérieur déclarait le 23 avril 2020 au matin que « les causes sont nombreuses, mais il y a notamment l’effet du confinement, la dureté du confinement pour ces jeunes gens ».
Sur le terrain on rit jaune : « Ce sont justement les mêmes qui ne respectent pas le confinement ! ».
Mais Castaner a poursuivi : « Je pense aussi à cette galère dans laqulle ils sont, à cette pauvreté qu’ils vivent auprès de leurs proches et qui peut provoquer une colère. ».
Les policiers sont bouche bée : « Pas un mot pour ses policiers sauf quand ils se prennent une enquête IGPN… Il continue avec cette culture de l’excuse, il est franchement pathétique », lâche Louis, policier Poitevin.

Dans les faits, beaucoup de policiers déplorent une réponse pénale inexistante.
« La justice freine des quatre fers. On essaye de bétonner les procédures, mais on passe surtout pour des cons. Avant de mettre des amendes, on fait énormément de prévention, comment voulez-vous que ces gars-là nous prennent au sérieux ? Ils s’en foutent parce qu’on leur donne toutes les raisons de s’en foutre. »
« C’est franchement ahurissant. On a eu des gars verbalisés quinze fois, qui écopent d’un rappel à la loi, quand ils ne bénéficient pas d’une infraction insuffisamment caractérisée. Sur le terrain, le sentiment d’impunité a de beaux jours devant lui ».
 

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