Extraits
de propos recueillis par Charlotte d’Ornellas pendant le confinement en avril
2020 auprès des policiers :
Voilà
plusieurs semaines que Paul (tous les prénoms ont été changés), commissaire en
Seine Saint-Denis, s’applique à faire respecter le confinement, dans son
difficile département. Il constate cependant que le relâchement n’est pas
moindre quand il rentre le soir à Paris. Dans le détail la comparaison lui
semble pourtant difficile à maintenir : « La différence, c’est que (dans le 93), les jeunes qui jouent au
foot, fument dehors, organisent des rodéos ou font vivoter leurs trafics, se
contrefoutent de la loi et de ceux qui sont chargés de la faire respecter »,
confie-t-il dans un soupir.
A
Poitiers, par exemple, un policier se désole de la bêtise crasse de cette
racaille : « On a essayé de
leur expliquer qu’ils risquaient de contaminer leurs proches… Ils s’en tapent. »
Un
policier des Yvelines ne sait pas s’il doit rire ou pleurer : « Il y a plein de gens avec qui cela se
passe de la même manière en banlieue ! Mais que les bobos viennent
observer ce qui arrive si on demande gentiment aux jeunes problématiques de
rentrer chez eux. On se fait insulter, cracher dessus et caillasser, ça fait
une petite différence dans l’intervention, c’est certain. »
Ce
ne sont pas tant les agissements d’une minorité défavorablement connue qui
exaspèrent les policiers, que les ordres qu’ils reçoivent.
Cette
lâcheté s’est illustrée à l’approche du Ramadan.
C’est
d’abord une note du patron de la police du Calvados qui enflamme les réseaux
sociaux. Il y invite ses effectifs à ne pas « intervenir dans les quartiers à forte concentration de population
suivant le ramadan » pour « éviter qu’un manquement aux règles de confinement ne dégénère et
provoque un trouble supérieur de violence urbaines ».
Devant
le tollé provoqué par la fuite, le patron de la DGPN a immédiatement désavoué
la consigne et demandé un rapport d’explication.. ;
Sur
le terrain, certains policiers ont failli s’étouffer : « Il ose faire un démenti alors qu’on a
reçu les mêmes ordres au téléphone ! », entame un commissaire
de Seine Saint Denis.
Un
policier de terrain ne décolère pas : « Le préfet du département et celui de Paris entretiennent leur
réputation de gros durs, mais ça dépend des situations apparemment »
« Depuis le début, les instances
religieuses appellent au respect du confinement, les mosquées sont fermées,
toute une partie de la population respecte les règles et c’est finalement la
hiérachie qui baisse son froc sans assumer », lâche sans pincettes
un policier.
Un
commissaire des Yvelines confie sa fatigue : « On nous met la pression sur
les chiffres et nous interdit en même temps d’aller là où sont commises les
infractions. On nous a même donné l’ordre d’aller verbaliser dans une enclave
très huppée de mon département, tous en appelant poliment à la "mesure"
dans les quartiers sensibles, c’est honteux ! »
Les
propos de Castaner au Micro de Jean-Jacques Bourdin ne passent pas ! Outre
la minimisation des violences, le ministre de l’intérieur déclarait le 23 avril
2020 au matin que « les causes
sont nombreuses, mais il y a notamment l’effet du confinement, la dureté du
confinement pour ces jeunes gens ».
Sur
le terrain on rit jaune : « Ce
sont justement les mêmes qui ne respectent pas le confinement ! ».
Mais
Castaner a poursuivi : « Je
pense aussi à cette galère dans laqulle ils sont, à cette pauvreté qu’ils
vivent auprès de leurs proches et qui peut provoquer une colère. ».
Les
policiers sont bouche bée : « Pas
un mot pour ses policiers sauf quand ils se prennent une enquête IGPN… Il
continue avec cette culture de l’excuse, il est franchement pathétique »,
lâche Louis, policier Poitevin.
Dans
les faits, beaucoup de policiers déplorent une réponse pénale inexistante.
« La justice freine des quatre fers. On
essaye de bétonner les procédures, mais on passe surtout pour des cons. Avant
de mettre des amendes, on fait énormément de prévention, comment voulez-vous
que ces gars-là nous prennent au sérieux ? Ils s’en foutent parce qu’on
leur donne toutes les raisons de s’en foutre. »
« C’est franchement ahurissant. On a eu des
gars verbalisés quinze fois, qui écopent d’un rappel à la loi, quand ils ne
bénéficient pas d’une infraction insuffisamment caractérisée. Sur le terrain,
le sentiment d’impunité a de beaux jours devant lui ».
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