Barbara
Lefebvre Publié le 16/01/2020 à
14:54
Le livre de Bernard Rougier, Les territoires
conquis de l’islamisme, a reçu un accueil très enthousiaste dans les
médias. Cette enquête est utile bien entendu, mais la présenter comme une
analyse inédite ferait sourire, si le sujet n’était pas si grave.
Deux ans après l’attentat de Trèbes, quatre ans après
les attentats de Magnanville, de Nice et Saint Etienne du Rouvray, cinq ans
après les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper-cacher de
Vincennes, du Bataclan et du Stade de France, huit ans après les tueries de
Toulouse, et sans énumérer la litanie des attentats dits « low cost » ou des
attaques de divers « déséquilibrés » tuant au cri d’Allah akbar mais qui n’ont
« rien à voir avec l’islam », où en sommes-nous de l’action républicaine contre
l’islam politique ? Un récent sondage montrait que 90% des Français
considéraient qu’elle était notoirement insuffisante. Certes, depuis le choc de
2015, nos services de renseignement ont retrouvé quelques moyens dignes de ce
nom pour travailler, eux que la droite prétendument « sécuritaire » avait
désarmé sous couvert de réorganisation politico-budgétaire. Néanmoins,
l’idéologie islamiste fait son œuvre paisiblement, enracinée depuis près de
trois décennies dans la plupart des villes de France. Cette réalité est
aveuglante. Pourtant des hebdomadaires, des émissions de télévision ou de radio
ont fait il y a quelques jours leur Une sur un ouvrage collectif, celui du chercheur
Bernard Rougier, en nous servant l’énième formule du « livre choc » sur
l’islamisme conquérant. Quel scoop !
Les publications sur la montée de l'islamisme
Sans remonter à des ouvrages aussi « anciens » que les
Territoires perdus de la République (2002) où beaucoup était déjà
expliqué à travers des exemples concrets du monde éducatif (ce terreau des
années 1990 qui produira les terroristes des années 2000-2010 !), on ne peut
que constater depuis 2015, a
minima, la somme des publications sur le sujet (essais, études d’experts,
rapports parlementaires). N’est-il donc pas assez affligeant d’observer en 2020
des journalistes ou présentateurs prendre une mine déconfite en recevant leur
invité, M. Rougier, pour lui poser des questions d’une banalité consternante,
comme s’ils découvraient la lune ? Certes, le réveil est douloureux pour
certains journalistes depuis 2015. D’autres ont logiquement besoin de continuer
à s’aveugler sans quoi c’est tout leur socle idéologique multiculturaliste qui
s’effondre. Mais il n’est qu’à lire les récurrentes enquêtes d’opinion sur plus
d’une décennie pour s’apercevoir que — comme souvent — la population a une
longueur d’avance en termes de compréhension du réel. En 2020, les « gens »
n’ont pas besoin de lire l’enquête des étudiants de M. Rougier pour « voir
et dire ce qu’ils voient » pour paraphraser Péguy. Cette enquête est utile
bien entendu, mais la présenter comme une analyse inédite ferait sourire, si le
sujet n’était pas si grave.
Depuis vingt ans, toutes ces pages que nous avons
noircies, ces heures de travail bénévole, ces engagements militants pour
préserver la République du pire ennemi qu’elle ait eu à affronter depuis le
fascisme, ces débats sans fin en radio et télévision, pour quel résultat ? A
lire le constat de Bernard Rougier : quasi nul ! A se dire d’ailleurs, qu’on
peut se contenter de lire Houellebecq… En effet, la littérature, quand elle a
du talent, a souvent plus de force pour décrire le réel de son temps et nous
projeter dans un futur probable, que nombre d’études raisonnables dites «
scientifiques » (si tant est que les sciences humaines, notamment les sciences
économiques et sociales relèvent de cette catégorie).
Les agents de l'islam politique ont su jouer de la faiblesse de l'État pour prendre du galon
Il ne fait aujourd’hui plus aucun doute que les agents
de l’islam politique ont pris racine en France, ils sont d’ailleurs pour la
majorité d’entre eux Français ; certains se sont même vus honorés par la
République, un peu trop bonne mère. « C’est avec des hochets qu’on mène le
monde », constatait l’Empereur en 1802, mais parfois c’est le
récipiendaire qui sait utiliser le hochet pour trahir la République. Les
acteurs de l’islam politique ont pris le pouvoir depuis le début des années
1990 par le tissu associatif (culturel, social, sportif, cultuel) qui est
l’écosystème idéal pour éclore comme force politique dans une démocratie :
entrisme et construction de réseaux d’influence locale, subventions publiques,
personnalités servant d’interfaces avec les élus. Le modèle associatif en
particulier dans le domaine social est bien plus performant en termes
d’entrisme et de lobbying que le militantisme syndicale ou politique. Ces
personnages, souvent proches de l’idéologie des Frères musulmans voire ayant appartenu
à la confrérie, ont paradoxalement pris du galon depuis 2015 quand ils ont
compris que la République bouleversée était avide d’interlocuteurs « musulmans
» pour continuer à jouer la mascarade du « vivre ensemble ». Ils ont habilement
pris le virage de la désolidarisation avec les fameux « radicalisés » voire
avec les Frères qu’ils prétendent désormais ne pas connaître, répétant à l’envi
« ce n’est pas cela l’islam ». Ils ont pris leur distance avec la dimension
djihadiste et la barbarie de l’Etat islamique les y a bien aidés. Pourtant, la
guerre djihadiste est intrinsèque à l’idéologie fréro-salafiste, mais encore
faudrait-il que la littérature du fascisme islamiste produite depuis un siècle
soit mieux lue et connue par ceux qui affirment que les Frères et leurs alliés
salafistes ne font pas la promotion du djihad guerrier mais du célèbre «
djihad intérieur, celui de l’âme »… Ce n’est même pas une affaire de
Taqiya chez ces islamistes de salon, c’est simplement de la stratégie
politique. Ces personnages n’ont pas besoin d’être candidats ou élus d’un «
parti musulman », ce serait même contreproductifs. Depuis des années, s’étant
rendus incontournables en tant que relais d’opinion (et pourvoyeurs de voix
pour les scrutins locaux) par le biais associatif, ils ont embarqué dans la
plupart des formations politiques à l’échelle de la commune ou du département
où ils ont servi de clientèle-caution, qui de « la diversité », qui de « la
communauté musulmane »… Gagnant-gagnant en somme. Et c’est là que se trouve le
cœur de l’affaire pour la République.
Les islamistes (en costume cravate autant qu’en
costume salafiste) jouent leur partition. Ils ont un agenda qui n’est ni
secret, ni récent comme les publications réalisées à leur sujet le démontrent.
Ils s’adaptent à l’environnement politique et culturel de la nation où ils se
trouvent, la littérature frériste est limpide sur ce point, Tariq Ramadan en
fut pendant vingt ans le paisible propagateur chez nous. La France laïque et
républicaine donne théoriquement aux islamistes plus de fil à retordre que
d’autres nations occidentales ; c’est pourquoi abattre la France et sa
République laïque c’est défaire l’Occident tout entier. Pour avancer l’islam
politique très minoritaire à l’origine dans le paysage musulman national, a pu
bénéficier de la force démographique produite par l’immigration de masse depuis
quarante ans. C’est un atout incomparable car plus la République laïque,
exigeante et méritocratique, s’est effacée dans les quartiers populaires, plus
l’islam politique a engrangé des soutiens. Et ce qui est tragique c’est que
plus son implantation est reconnue par les acteurs publics, plus cela dissuade
les Français musulmans de s’opposer frontalement à l’islam politique. Quand la
République ne daigne plus être un bouclier pour ses citoyens les plus fragiles
ou menacés, mais qu’elle les livre à quelques caudillos d’associations de
quartier, il ne faut pas s’étonner des dérives.
Les compromissions, les collaborations explicites, le clientélisme communautariste ont été évidentes dans certaines municipalités depuis 2006
Il n’est donc plus temps de couper les cheveux en
quatre, l’opinion est assez lucide sur les dangers de l’islam politique. Il est
temps en revanche que des journalistes, des enquêteurs, se lèvent pour relayer
les alertes citoyennes qui à l’échelle locale, municipale, départementale,
régionale, nationale, racontent les alliances contre nature entre d’une part
des élus (ou candidats) ou dirigeants politiques et d’autre part des individus
appartenant aux courants de l’islam politique. Ce sont eux, ces élus de la
République qui font la courte échelle aux islamistes pour gagner une élection,
qu’il nous faut maintenant dénoncer : les nommer, décrire leurs petits
arrangements par le menu. Sans leur complicité, les islamistes seraient restés
la minorité fasciste qu’ils étaient à la fin des années 1980.
La campagne municipale qui s’ouvre me semble le moment
idéal pour dénoncer ces collusions mortifères, tant les compromissions, les
collaborations explicites, le clientélisme communautariste ont été évidents
dans certaines municipalités depuis 2006 puis 2014. Certaines communes de
banlieue des grandes métropoles sont connues pour être le terrain de jeu des
islamistes qui ont fait copain-copain avec telle ou telle équipe municipale,
tel ou tel président de département ou de région, tel ou tel parlementaire.
Cela va-t-il recommencer en 2020 ? Après « la lutte contre l’hydre islamiste »,
la fameuse « guerre au communautarisme » que prétend lancer le président Macron
début février par un énième discours, risque d’être un nouveau feu de paille.
Nos élus ne doivent pas seulement être transparents
sur l’origine de leur garde-robe ou de leurs homards, ils nous doivent d’abord,
à nous citoyens qui leur déléguons notre pouvoir souverain, la transparence sur
la nature des alliances qu’ils contractent en notre nom. Quand celles-ci
s’avèrent anti-républicaines, contraires à la neutralité laïque, qu’elles
répondent à des manœuvres pour acheter la paix sociale en déléguant le pouvoir
à des chefferies locales chargées de « tenir le quartier », c’est le devoir des
citoyens de rompre le silence. C’est surtout le devoir des journalistes de
relayer ces alertes et les approfondir par des enquêtes nourries. A l’orée des
échéances électorales locales, chaque citoyen doit être attentif et apprendre à
« lire » une liste municipale… La République n’est pas un instrument
institutionnel qu’une poignée de politiciens manipulent pour nous gouverner.
Nous sommes la République et sans notre vigilance, elle n’est rien. Cessons
d’accuser nos élus de la dévoyer si nous ne sommes pas capables de les
démasquer quand ils la trahissent. Cela demande de la persévérance, du courage,
car les intimidations sont réelles quand on s’attaque aux « petits arrangements
entre amis », mais c’est un devoir citoyen.
il suffisait pourtant de se dire que l' islam a remplacé bien des religions d' origine là où ils se sont imposés !
RépondreSupprimerEt puis il suffit de regarder le Liban comme le Kosovo
Oui, cette cécité de nos "élites", ne s'explique pas même par le seul laxisme ! Une volonté probable d'appliquer leur idéologie mondialiste sur le brassage qui entrainera l'homogénéisation... Ce qui n'est pas vrai, on le voit avec l'admission de la Chine dans l'OMC, qui n'entrainera jamais la libéralisation du régime communiste de Pékin...
Supprimertrès bonne journée à toi