Écrit le 13 décembre 2010
Mon cher Kikson,
J’espère que tout se passe bien… C’est vrai, nous sommes si éloignés, que souvent je m’inquiète pour toi. Je suis très fier de toi, de ton opiniâtreté et des efforts que tu fais pour réussir dans cette nouvelle formation.
J’espère que nous pourrons nous revoir dans pas trop longtemps, quand ce covid de malheur cessera de détruire des familles par ce cloisonnement de survie détestable qui m’empêche de te faire des bisous.
Je vous aime tous les trois autant. Maintenant, je ne me souviens plus de mes rêves actuels, mais je me souviens du dernier énorme cauchemar que j’ai eu il y a plusieurs années (environ en 2012)… En tous cas avant le début des attentats de Toulouse. Ce cauchemar n’était donc pas lié à l’actualité, mais il m'a profondément marqué, comme tu vas le voir…
Mes trois enfants, (qui étaient bien vous trois), vous étiez prisonniers d’une bande de barbus armés qui vous retenaient en otages. Cela se passait dans la rue XXXXXX, au niveau de la placette. J’étais à 50 mètres plus bas, non armé et ta petit’maman derrière moi. Je me proposais en échange de mes enfants. Leur chef ne voulait pas… Il me proposait de désigner moi-même, un de mes enfants qu’il abattrait, libérant ensuite les autres, sinon il vous tuait tous les trois… Que devais-je faire malgré mes vaines supplications ? Donner l’un de mes fils, qu’ils exécuteraient ? Au risque qu’ils les abattent tous, quand même ? Ne rien dire et voir tuer mes trois enfants ? Le délai raccourcissait et je ne pouvais pas me décider, je ne pouvais sacrifier aucun de mes fils. Le compte à rebours touchait à sa fin...
Au moment ultime, je me suis réveillé en sursaut ! Je crois que j’ai du crier et réveiller ta maman… J’étais glacé, tout en étant en nage, mon cœur battait à tout rompre et je tremblais de tous mes membres, claquant même des dents… J’ai mis longtemps à me rétablir de ce rêve, parce qu’à chaque fois que j’y repensais le même effroi me reprenait… Je n’ai même pas osé le coucher sur le papier, tant j’avais peur que ce moment de malheur ne fut prémonitoire…
D’un autre coté, j’étais et je suis toujours, depuis ce cauchemar, si content et si soulagé que vous soyez là, tous les trois…
Ce cauchemar signifiait une chose : Je ne pouvais plus vous protéger comme quand vous étiez petit…
Je ne prie jamais pour moi, mais je prie de temps en temps pour les membres de ma petite famille…
On dit qu’on n’adore que Dieu ??? Moi, ce sont mes trois enfants que j’adore, passionnément et peut-être même à la folie… Pour moi, ce qui est sacré, c’est vous trois…
Vous êtes, chacun d’entre vous des mecs d’une valeur humaine formidable (ne prends pas la grosse tête quand même). Et si je le pouvais, je vous ferais une vie de rêve…
Je rêve éveillé très souvent, que j’ai plein de millions (gagné où, au loto ? je ne joue pas)… Je crée une entreprise et je vous embauche tous les trois et l’entreprise vous paye ainsi que vos cotisations de façon que vous ayez une retraite convenable… On achète un terrain par exemple et on construit une maison, on la vend, puis on recommence… Les jours d’intempéries, on reste à la maison, on n’est pas aux pièces ! Tant pis pour le rendement, on s’en fout ! Comme ça on serait souvent ensemble… Bien évidemment vous auriez une maison à vous… Enfin bref, c’est con un rêve…
J’espère que vous resterez toujours unis tous les trois et que vous vous soutiendrez plus tard, quand nous ne serons plus là ta mère et moi…
Rajouté en 2020 : Bon bref, je ne suis pas très drôle dans cette lettre… Je crois que c’est la dépression du confinement qui rend mes propos moroses.
Je pense beaucoup à toi et je te fais de gros bisous mon fiston
Papa
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