Écrit par Michel Psellos.
Michel Psellos nous éclaire sur ce sujet anecdotique mais représentatif des mœurs et de l’exercice du pouvoir sous la Ve République.
Michel Psellos nous éclaire sur ce sujet anecdotique mais représentatif des mœurs et de l’exercice du pouvoir sous la Ve République.
La
règle initiale concernant la rémunération du président de la République a été
fixée à l’arrivée du général de Gaulle à l’Élysée le 8 janvier 1959 : bien que
les responsabilités du poste aient décuplé ou centuplé, le chef de l’État
décide de ne rien modifier et conserve la même rémunération que celle de son
prédécesseur René Coty, alignée sur le traitement de base du vice-président du
Conseil d’État qui est le plus haut fonctionnaire français.
Le
Général au régime
En
ce qui concerne le régime de retraite, le Général ne prévoit rien d’autre que
le droit pour les anciens Présidents de la République de siéger à vie au
Conseil Constitutionnel.
Enfin,
il refuse de regrouper dans un budget unique les dépenses de l’Élysée, et préfère
maintenir la tradition d’une prise en charge de l’essentiel des dépenses de
fonctionnement et de personnel par les ministères : la plupart des conseillers
au secrétariat général de l’Élysée sont des fonctionnaires qui restent
rémunérés par leur corps d’origine (Inspection des Finances, Ponts et
Chaussées, etc…), les autres bénéficient d’un emploi de complaisance auprès
d’entreprises publiques comme Air France ou EDF, tandis que les huissiers,
serveurs ou jardiniers viennent principalement du ministère de la défense.
La
rémunération des membres du gouvernement, dont les responsabilités n’ont pas
changé par rapport à la IVe République même si le rôle constitutionnel du chef
de gouvernement diffère, n’est pas non plus modifiée à l’arrivée de Michel Debré
à Matignon : le Premier ministre voit comme le président de la République son
traitement aligné sur celui du plus haut fonctionnaire français sans les primes
(ce qui correspondrait aujourd’hui à une rémunération d’environ 10.000 euros
par mois), les ministres viennent un cran en-dessous, les secrétaires d’État
encore un cran plus bas.
La
pratique des fonds spéciaux de Matignon et des enveloppes en liquides pour les
primes des membres des cabinets ministériels permet aux ministres d’améliorer
l’ordinaire et d’être un peu mieux payés que leurs fonctionnaires les plus
chevronnés, mais il n’en demeure pas moins qu’on ne s’enrichit pas avec un
traitement de ministre, sauf cas de prévarication avérée.
On
raconte que Marcel Dassault, reçu un jour dans le bureau de De Gaulle à
l’Élysée et impressionné par le décorum, n’aurait pu réfréner sa curiosité et
lui aurait demandé en sortant : «Combien ça gagne, un président de la
République ?». La légende ne dit pas si le Général prit la peine de lui
répondre.
Il
faut ajouter pour être complet que le traitement du président de la République
n’est que de l’argent de poche, puisque le titulaire de la fonction est
entièrement pris en charge par l’Élysée et dispose de plusieurs autres demeures
à Rambouillet, Brégançon... dans lesquelles le couvert et la domesticité sont
fournis par la République.
Le
général de Gaulle n’en usa guère car il préférait passer week-ends et vacances
dans sa maison de Colombey-les-deux-Églises, mais il répondit un jour à qui lui
proposait de supprimer ces autres demeures présidentielles qu’il préférait les
garder pour ses successeurs, afin qu’ils aillent en vacances «chez eux et non
chez les autres» pour éviter d’être redevables de quoi que ce soit à plus
fortuné qu’eux...
Sa
veuve se contenta jusqu’à la fin de la réversion de sa retraite de général de
brigade à titre temporaire, dont le montant ne lui permettait pas d’entretenir
convenablement la gentilhommière de Colombey. Celle-ci est toujours la
propriété de la famille et, n'étant pas classée monument historique, n'a jamais
reçu un sou de l'État. Ses travaux d'entretien sont financés par les visites
et, occasionnellement, l’association nationale pour la fidélité au général de
Gaulle.
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