vendredi 9 septembre 2016

Mémoires et radotages (66) – Le plus heureux du monde bientôt en colère



J’ai eu les parents les plus formidables du monde. Dévoués, aimants, ils se sont toujours sacrifiés pour nous. Parfois, il n’y avait à manger que pour nous, mais c’est avec joie qu’ils se privaient, parce que nous étions leurs trésors, les amours de leur vie…

Maintenant, j’ai les enfants les plus formidables du monde. Aimants, fidèles en amitié et en amour, d’une honnêteté absolue, scrupuleux, généreux. Bien qu’avec de faibles moyens financiers, qui les amènent à se priver, ils s’offrent des cadeaux entre frères, où ils mettent tout leur amour. Même nous, avons droit à des cadeaux, alors que nous leur avions dit de ne pas faire cela, que leur présence est le seul cadeau que nous désirions. Je leur avais dit que je n’avais plus les moyens de leur offrir comme avant… Ils n’en ont cure ! Même le petit dernier, économise sur son argent de poche et ne manque jamais de nous offrir, malgré nos protestations, un cadeau et quand celui-ci est modeste, il y joint un magnifique dessin dédicacé…

Quel bonheur ! Je suis l’homme le plus heureux du monde !...

… En même temps, je me cache parfois pour pleurer… Tant d’amour de leur part, moi qui ne le mérite pas ! Qu’ai-je fait pour eux ? Les mettre sur terre dans un monde sans travail, sans avenir, sans espoir… N’est-ce pas criminel ? Pas coupable ?... En tous cas responsable…

Responsable de ne pas avoir tissé de réseau pour les caser à la fin de leurs études.

Responsable de ne pas avoir réussi à amasser suffisamment d’argent pour les aider, ne pas avoir réussi à conserver mon entreprise pour leur donner un emploi en famille et assurer leur avenir… Je pense à toi Toto qui à dix ans, m’avait demandé : « Est-ce que je pourrais travailler avec toi plus tard ? »… Et je t’avais répondu « Oui », comme un gros con ! Alors que quelques mois après, la loi Besson dont le décret d’application tardait, me privait de travail, les promoteurs différant leurs opérations, alors que quelques autres mois après, la loi Aubry faisait plonger la rentabilité de mon entreprise… Je t’avais promis mais je n’ai pas tenu, j’ai cessé mon activité…

Responsable de ne pas avoir fait la révolution pour chasser ces minables dirigeants de gauche puis de droite, qui ont laisser s’effondrer le tissus industriel et tout le cortège d’emplois y rattachés…

Responsable de ne pas avoir deviné les intentions féodales qui seraient petit à petit imposées aux Français et à vous mes petits…
Mon Kiki, tu survis comme tu peux dans la précarité et avec un salaire de Roumain…
Mon Nono, mon benjamin, toujours sans emploi à 24 ans, harcelé par le pôle emploi qui cherche tous les prétextes pour te rayer de leur liste de demandeurs d’emplois, alors qu’ils ne sont pas foutus de te proposer un seul emploi réel… Les seuls emplois qu’ils ont, c’est les leurs et ils osent te considérer de leur hauteur avec morgue et dédain…
Mon Toto, tu gagnes ta vie au smic, mais forcé à faire des heures supp… Avec ce patron qui veut t’obliger à travailler le week-end, dans des conditions pas très salubres. Tu viens brusquement de perdre un peu d’acuité visuelle de ton œil gauche. Ton emploi est précaire, car on t’a bien fait comprendre où était la porte. Je vois également que les propositions faites au personnel, sont empreintes de cette loi travail initiée par cette gauche de merde, dont le décret d’application n’est même pas encore voté, que les patrons la mettent déjà en œuvre…

En même temps, comment feraient-ils ces petits patrons sous-traitants de dernier rang, manipulés par leur client unique, pour ne pas être obligés de serrer leurs prix et de se retourner contre la main-d’œuvre qui devient corvéable à merci ?…

Pour tout cela, que je n’ai pas su empêcher, je me sens coupable, mes chers petits…

Je vous aime, mais je souffre pour vous et vos avenirs que je souhaitais radieux, le jour où je vous ai pris dans les bras pour la première fois…

Heureux ? Mais aussi le plus malheureux du monde !

Mais quand chassons-nous ces politiciens qui sacrifient nos enfants ?...

Ma tristesse pourrait bien se transformer en colère incontrôlable un jour !

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