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La maladie de Dupuytren ou contracture
de Dupuytren est une fibrose rétractile de l'aponévrose
palmaire (une membrane située entre les tendons
fléchisseurs et la peau). Elle entraîne une rétraction et une flexion
progressive et irréductible des doigts. L'étiologie
est inconnue, l'atteinte est souvent bilatérale, les tendons fléchisseurs des
doigts sont indemnes, ce ne sont pas eux qui se rétractent. Elle a été décrite
en 1831 par le baron Dupuytren, chirurgien à l'Hôtel-Dieu de
Paris. Le traitement classique était chirurgical, le traitement de choix actuel
devient l'aponévrotomie percutanée.
Épidémiologie
La prévalence
est comprise entre 0,6 et 31,6 % et augmente avec l'âge1.
Anatomie
La fibrose
entraîne la transformation de l'aponévrose palmaire et digitale et aboutit à la
formation de brides fibreuses :
- les brides palmaires entraînent une flexion des articulations métacarpophalangiennes ;
- les brides digitales (l'atteinte digitale pure est rare) entraînent une flexion des articulations interphalangiennes proximales et parfois distales.
Ces brides
s'associent à des nodules sous-cutanés et à des ombilications cutanées.
Les doigts les
plus fréquemment touchés sont par ordre de fréquence décroissante : D4,
D5, D3, D1, D2.
Lésions histologiques
Les coupes histologiques
au niveau de l'aponévrose palmaire montrent l'existence d'un tissu collagène
de type III
le collagène du tendon étant normalement de type I
Sans entrer dans
les études au microscope électronique, il faut retenir qu'il existe deux
lésions distinctes :
- l'épaississement nodulaire de haute densité cellulaire ; de très nombreux fibroblastes et fibrocytes sont enclos dans un riche réseau de fibres collagènes avec une hypervascularisation locale ;
- l'épaississement aponévrotique lamellaire de faible densité cellulaire ; de rares fibrocytes (appelés dans le tendon ténocytes) existent entre les fibres collagènes.
Causes et facteurs de risque
La cause de la
maladie de Dupuytren reste toujours inconnue de nos jours. De nombreux facteurs
ont été incriminés, tels que l’épilepsie, le diabète3,
le travail manuel4,
l’alcool5,
le tabagisme6, etc.
En fait, il s'agit essentiellement de corrélation, sans preuve formelle de
causalité. Il est toutefois recommandé de rechercher systématiquement un
diabète éventuel devant une maladie de Dupuytren.
La seule chose
établie avec certitude est l’existence d’un facteur génétique. Exceptionnelle
chez les Asiatiques et les Africains, la maladie de Dupuytren survient
seulement chez les sujets blancs, européens du nord (Islande, Scandinavie,
Russie, Angleterre) et chez leurs descendants, en particulier dans les pays
d'émigration britannique (Canada, États-Unis, Australie). Les invasions des Vikings restent le
facteur prédominant de la répartition de la maladie dans le monde, et les
patients atteints ont d’ailleurs très souvent les yeux bleus ! De plus, au
moins 10 % d’entre eux ont des membres de leur famille atteints par
l'affection. Mais cette notion est très souvent inconnue du patient. Plusieurs
mutations favorisantes ont été identifiées7,
la plupart codant pour des protéines de type Wnt8.
Elle est plus
rare chez la femme et l'atteinte y est plus tardive de près de 10 ans9.
Diagnostic
Il est fait à
l'interrogatoire médical et à l'examen
clinique et doit être évoqué devant le terrain (homme de plus de 40 ans),
un début insidieux et une aggravation progressive, concernant les deux mains.
L'examen montre
l'apparition dans la paume de la main d'un ou plusieurs nodules siégeant à la base du 4e ou 5e doigt.
Ces nodules sont fermes, adhérent à la peau et aux plans profonds. Avec le
temps, ils s'allongent et forment des « cordes longitudinales ». Peu
à peu apparaît une flexion irréductible des doigts intéressant les
deux premières phalanges. Dans les formes graves, la main peut se fermer
complètement.
L'atteinte est,
en règle, non douloureuse, sans autres symptômes associés.
Évolution
La fibrose
s'aggrave progressivement, par contre de manière discontinue avec des poussées
successives, l'aponévrose s'épaissit, se rétracte, forme des nodules et adhère
aux tendons. L'extension des doigts devient progressivement de plus en plus
limitée. L'atteinte prédomine sur les 4e et 5e doigts.
Finalement l'extension est impossible, les doigts deviennent totalement fléchis
et restent dans cette position, entraînant une impotence
fonctionnelle.
Il y a quatre
stades évolutifs :
- stade 0 : absence de lésion ;
- stade N : nodules sans rétractation ;
- Stade I : flexion de 0 à 45° ;
- stade II : flexion de 45° à 90° ;
- Stade III : flexion de 90° à 135° ;
- Stade IV : flexion supérieure à 135°, hyperextension de la 3e phalange sur la 2e, elle-même complètement repliée sur la 1re.
La récidive de
la maladie est fréquente (50 % des cas).
Traitement
Traitement chirurgical
L'indication de
l'intervention est porté sur l'évolution et la présence d'une flexion
permanente d'une articulation métacarpo-phalangienne de plus de 30° ou d'une
articulation inter phalangienne.
Le traitement
chirurgical classique de la maladie de Dupuytren est l'aponévrectomie,
c'est-à-dire l'exérèse chirurgicale de l'aponévrose palmaire moyenne. Dans
cette maladie, les tendons ne sont pas touchés. Dans les cas où le flessum
(flexion permanente des doigts) est important, l'extension obtenue en
per-opératoire entraîne une perte de substance cutanée qui peut nécessiter la
réalisation d'un lambeau de couverture ou d'une greffe de peau. Il est
également possible de laisser l'incision opératoire ouverte et d'attendre la
cicatrisation par la mise en place de pansements gras. Cette intervention
nécessite donc un suivi régulier pour changer les pansements pendant la
cicatrisation avec des exercices pour que les doigts retrouvent leur mobilité
totale. Le temps de guérison par cette méthode est d'environ un mois où le
patient ne pourra pas utiliser pleinement ses mains.
L'aponévrotomie
percutanée, ou fasciotomie, peut être utilisée en cas de bride palmaire unique.
Le geste se fait en ambulatoire, après anesthésie locale ou loco-régionale,
l'opérateur libère le tendon à l'aide du biseau d'une aiguille glissée sous la
peau. Et par des flexions et extension du doigt fait rompre totalement la bride
fragilisée par l'acte. Cet acte doit être effectué par un praticien très
spécialisé. Il n'est pas obligatoire de le faire au bloc opératoire (bien que
cela soit fortement conseillé) mais cela demande une bonne connaissance de la
technique. À court terme, les résultats sont comparables à ceux de
l'aponévrectomie11.
Cette méthode présente cependant un risque important de récidive (85 % à
cinq ans) car les brides ne sont que sectionnées sans être enlevées. Il y a
aussi un risque de sectionner un nerf ou un tendon en sectionnant la bride à
l'aveugle avec le biseau de l'aiguille.
En cas de
récidives multiples, et devant l'échec du traitement (aponévrectomie), on peut
être amené à proposer l'amputation du doigt concerné ou la réalisation d'une
arthrodèse raccourcissant de l'articulation inter-phalangienne proximale.
Risques des traitements chirurgicaux
En ce qui
concerne les risques du traitement chirurgical, il faut distinguer :
- le risque de récidive de la maladie de Dupuytren et/ou le risque de son extension à d’autres doigts. Ce risque est permanent et imprévisible, lié à la nature inconnue de la maladie ;
- l'absence d’amélioration du déficit d’extension, qui est d’autant plus fréquente que la maladie est évoluée ou qu’il s’agit d’une forme digitale pure ;
- les complications proprement dites de l’intervention sont :
- surtout l'imprévisible et désespérante algodystrophie, possible dans 10 à 30 % des cas,
- la contusion ou la blessure d’une branche nerveuse sensitive d’un doigt, toujours possible, avec selon les cas des fourmillements, un engourdissement ou une insensibilité plus ou moins complète de la moitié correspondante du doigt. Ces signes peuvent être transitoires ou définitifs,
- souffrance ou nécrose plus ou moins complète de la peau malade décollée lors de l’intervention, qui n’est plus assez vascularisée, ou nécrose d’une greffe de peau. Le traitement est alors celui d’une perte de substance cutanée (le plus souvent par cicatrisation spontanée sous pansements gras, ou parfois par réintervention pour greffe et/ou lambeau),
- raideur articulaire définitive d’un doigt,
- nécrose totale du doigt par insuffisance artérielle, pouvant conduire à son amputation,
- complications chirurgicales non spécifiques, à vrai dire rares dans cette intervention : hématome, infection, lâchage de sutures, paralysie sous garrot pneumatique, etc.
Pour le cas de
l’aponévrotomie, cette méthode simple mais aveugle comporte un risque important
de sectionner les nerfs sensitifs du doigt. D’autre part, elle laisse en place
les tissus malades, qui ne sont que sectionnés.
Traitement non chirurgical
Les traitements
non chirurgicaux sont réservés aux échecs et aux contre-indications à la
chirurgie. Certaines équipes utilisent la radiothérapie
avec un certain succès. L'injection locale de collagénase
réduit les contractures et améliore la mobilisation des doigts.
Le traitement
avec collagénase de Clostridium histolyticum est un traitement
injectable qui est appliqué avec succès dans plusieurs pays comme les
États-Unis, le Canada, etc. Les risques de traitement sont minimes et les
résultats très positifs.
En février 2010, l'Agence américaine des produits
alimentaires et médicamenteux (US Food and Drug Administration ( FDA)) a
approuvé la collagénase injectable extraite de Clostridium histolyticum
pour le traitement de la maladie de Dupuytren.
Le traitement est commercialisé sous la marque Xiaflex.
En février 2011,
le Comité des médicaments à usage
humain de l'Agence européenne des médicaments
a approuvé la préparation pour l'utilisation en Europe. Il est commercialisé
sous la marque de Xiapex.
En avril 2012, Santé
Canada a approuvé la collagénase injectable extraite de Clostridium
histolyticum pour le traitement de la maladie de Dupuytren.
Le traitement est commercialisé sous la marque Xiaflex.
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