Prologue
C'est l'histoire d'un homme dans la tourmente de la débâcle
Française de 1940.
Cet homme aujourd'hui disparu, m'a raconté cette épopée hors du commun.
Cet homme aujourd'hui disparu, m'a raconté cette épopée hors du commun.
Il a occulté pendant plus de cinquante ans cette expérience
douloureuse.
Un jour de 1994, ses souvenirs refirent surface et il me confia pendant 12
heures d'affilées, l'aventure extraordinaire qu'il vécut à partir du 10 mai
1940. Je n'avais pas de magnétophone.
Je lui ai demandé à plusieurs reprises, par la suite,
d'enregistrer ce récit. Il refusa toujours, parce que ce souvenir douloureux,
il s'en était déchargé en me le racontant, il ne voulait dès lors plus y
revenir.
J'ai oublié les noms, les lieux exacts.
Je me sens le devoir de raconter par écrit cette histoire
authentique qui m'a été confiée en tant que dépositaire de ce témoignage
poignant.
Petite histoire, qui fait partie de la Grande histoire :
l'Histoire de France.
On retient généralement la défaite cinglante de nos forces
armées, mais connaît-on la bravoure des hommes qui ont donné leur vie pour
défendre notre Patrie ? Non.
Je vais donc essayer de vous raconter les faits, tous
véridiques en parlant à la première personne du singulier, comme mon père me les a, à peu près, racontés. Vous voudrez bien excuser toutes les imprécisions temporelles,
géographiques, nominatives, l'acteur de ces évènements, mon père, n'étant plus de ce
monde...
...................
09 mai 1940
Après être passés par Montcornet
et Monthermé, nous avons fait mouvement vers la frontière.
Nous étions depuis quelques jours
dans les Ardennes.
Nous avons peu progressé car nos
ordres nous limitent à faire ce que nous faisons et pas plus.
Nous ne savons pas que nous ne sommes
pas concernés par la vraie offensive Franco-anglaise qui se déroulera plus au
nord ni que notre état-major ne nous fait avancer que pour assurer une
continuité du front.
C’est pour cela que notre
dotation de guerre est réduite à sa plus simple expression.
Nous avons peu de munitions en
réserve. Une seule batterie d’artillerie assure notre couverture à plusieurs
kilomètres derrière nous.
Nous venons cependant de
percevoir, des petits canons antichars d’un modèle tout nouveau.
Le problème est qu’on a oublié de
nous envoyer des instructeurs pour nous apprendre à nous en servir. De plus, on
a également oublié de nous fournir les obus qui iraient sûrement bien avec ces
canons.
Nous pestons contre la mauvaise
organisation de notre armée, mais en nous disant que si nous étions « la
cinquième roue du carrosse », nos collègues du front nord étaient
certainement beaucoup mieux dotés et que c’était cela l’essentiel.
Ce que nous ne comprenons pas,
c’est que bien que nous « attaquions » l’ennemi, il y ait si peu
d’officiers, présents dans le régiment. Nombre d’entre eux sont en permission,
pendant que nous, régiment de 2500 hommes sommes commandés par un lieutenant.
Enfin, puisque ce n’est pas ici
que l’histoire s’écrit, c’est moins grave, mais quand même, autant d’officiers
en « perm », c’est vraiment déconcertant.
J’ai fait mon service de 1938 à
1939 dans la 36ème compagnie du 8ème RI.
A peine démobilisable, voilà que
commence cette « drôle de guerre », où personne ne se bat.
Il a fallu que les Boches
attaquent et neutralisent en un temps record la Belgique et la Hollande pour
que les alliés envahissent la Belgique sur la demande expresse du gouvernement
Belge, qui jusque là nous avait refusé l’accès de son territoire.
Donc me voici enrégimenté dans le
8ème Régiment d’Infanterie Mécanisée (héritier du 8ème Régiment
d’Infanterie de Ligne qui s’est couvert de gloire sous Napoléon... Quelle
compagnie ? Quelle section ?...
(Mécanisé : Cela veut dire que les autobus Parisiens réquisitionnés
nous ont fait l’honneur de nous transporter jusqu’au front Français)… La
pénétration en Belgique, nous l’avons faite de nuit et à pieds…
Je suis Caporal-Chef et je commande
une section. Je suis tireur d’élite à la mitrailleuse Hotchkiss
Nous sommes dans des positions en
hauteur à moitié en tranchée et à moitié derrière un merlon. Nous dominons le
paysage devant nous.
Les collines Ardennaises sont
très boisées et pourraient offrir une bonne cachette à un adversaire
improbable.
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