Si la justice civile fixe le domicile du chanteur en France, les sommes réclamées par le fisc à ses héritiers pourraient grimper. Explications.
Par Laurence
Neuer
Modifié
le 10/12/2018 à 10:24 - Publié le 06/12/2018 à 07:30 | Le Point.fr
Après la pression médiatique, celle de
l'administration fiscale : Laeticia, désignée unique héritière par le
dernier testament établi par Johnny Hallyday en
Californie, est à présent dans le viseur du fisc. L'administration fiscale
lui réclamerait 11 millions
d'euros, révèlent les auteurs du livre Laeticia, la vraie histoire (Plon). Ardavan Amir-Aslani,
l'avocat de la dernière épouse de Johnny Hallyday, serait en train de
« négocier avec Bercy un échelonnement raisonnable de ce remboursement.
D'autres sommes importantes pourraient lui être exigées si la justice et/ou le
fisc considéraient que le montage du trust aurait servi à pratiquer l'évasion
fiscale », précisent les auteurs.
Ils évoquent ici deux types de dettes : la dette
fiscale liée aux montages d'optimisation artificielle de ses revenus, et la
dette judiciaire issue d'une éventuelle fraude pénale liée à la constitution du
trust attaqué par les deux aînés de Johnny Hallyday, déshérités selon le
testament californien.
Piège fiscal
En France,
le principe est simple : les dettes fiscales du défunt nées en France et
aux États-Unis font partie
du passif successoral. « Elles viennent en déduction du patrimoine
transmis. Le notaire détermine l'actif, puis le passif, dont les dettes
fiscales, qu'il retranche pour obtenir un actif net », rappelle
Hervé-Antoine Couderc, avocat fiscaliste au sein du cabinet Andersen Tax &
Legal.
Toute la difficulté est de fixer le périmètre de ces
dettes, s'agissant d'une succession internationale. Johnny était résident
américain, il possédait des biens et donnait ses concerts dans plusieurs pays.
Il est mort en France, pays de sa nationalité. Le droit fiscal s'entremêle
alors avec la problématique de la loi applicable à la succession, enjeu du
débat actuel.
« Sur le plan du droit civil, le règlement
européen de 2012 en matière de successions précise que la loi
applicable est en principe celle de l'État où le défunt avait sa résidence
habituelle au moment du décès. Mais il ajoute : lorsqu'au moment du décès,
il avait des liens plus étroits avec un autre État, c'est la loi de cet autre
État qui s'applique. C'est sur cette règle que les avocats de David et Laura se
fondent sans doute pour demander l'application du droit français, réservant aux
deux enfants majeurs du chanteur une partie de la succession », souligne
Emmanuel Dinh, avocat fiscaliste du cabinet Andersen Tax & Legal, et
directeur du master de fiscalité de l'entreprise de l'université
Paris-Dauphine. Mais, s'ils ont gain de cause sur le terrain du droit civil,
ils risquent de se piéger eux-mêmes du point de vue fiscal !
« Sur le plan du droit fiscal, une personne qui a
le centre de ses intérêts vitaux dans un État [notion distincte, mais néanmoins
proche de celle de “liens étroits” avec un État, appliquée en matière civile,
NDLR] peut être considérée comme domiciliée fiscalement dans cet État. Ainsi, le fisc pourrait considérer que
Johnny était un résident fiscal français, ce qui signifie que tous ses biens,
quelle que soit leur situation, sont imposables en France, de même que tous ses
revenus. L'obligation fiscale est en effet illimitée pour les résidents fiscaux
de France, et l'existence d'un trust, considéré comme “transparent” aux yeux de
la loi fiscale française, ne change rien. Cela signifie concrètement que ses
héritiers devraient payer l'impôt sur les revenus dû sur les trois dernières
années (compte tenu de la prescription), et l'ISF sur les six dernières années,
auxquels s'ajoutent les intérêts de retard, et certaines majorations pour
compenser le préjudice subi par le fisc », note Emmanuel Dinh.
Exceptions
Concernant le trust successoral, le raisonnement est
différent. « Par principe, un trust n'est pas un véhicule d'optimisation
fiscale. C'est un outil très répandu, dans un environnement anglo-saxon, qui
permet l'organisation de la transmission du patrimoine sur une ou deux
générations. Si les juges considéraient que le trust était un montage destiné à
dissimuler des sommes qui auraient dû être soumises à l'impôt, ils mettraient
alors en évidence une fraude fiscale, qui est une infraction pénale. Or, tout
ce qui a une nature punitive ne se transmet pas. L'action pénale s'éteint avec
le décès. En vertu du principe de personnalité des peines, Laeticia ne
supportera pas ce risque pénal », explique Hervé-Antoine Couderc.
À cela, deux exceptions : « Si on la
considérait comme complice de cette fraude, ou auteur ou complice de
blanchiment de fraude fiscale qui est un délit autonome. On peut en effet aller
chercher celui qui réintroduit dans le circuit économique légal des sommes dissimulées
aux services fiscaux. »
Salut "zalandeau"
RépondreSupprimerDans cette page explicative sur la situation de la succession "jojo" il y a des éléments qui m'ont éclairés comme d'autres que je connaissais déjà. J'ignore si la veuve à "jojo" est assez intelligente et instruite à de telles manigances ou si elle bénéficie d'un conseil mais elle aura affaire à forte partie avec le fisc français. Pour ceux de Bercy, le fric a une odeur que ne sent pas le commun des mortels et, comme le cochon qui sent une truffe, ces gens-là ne lâchent pas le morceau.
Bonne fin de journée !
Jusqu'à présent je ne vois que des fraudeurs profitant des accords internationaux pour gruger le fisc... Et beaucoup moins d'actions du fisc pour s'attaquer aux ruisseleurs...
SupprimerJ'avais déjà expliquer comment une entreprise italienne avait grugé le fisc de la TVA pour un chantier réalisé à Issy les moulineaux... Et tous ces tâcherons au black venus de slovénie (pour ce même dernier chantier avant que je cesse de travailler)...
Très bonne soirée