Il était une
fois dans des temps très anciens, des hommes. Ils passaient leur vie à chasser,
à cueillir, à fabriquer des objets, pour eux et pour leurs familles...
Il fallait mériter
sa pitance. Autant on tolérait le vieillard provisoirement, autant les autres
devaient donner un coup de main...
L'un d'entre eux
était chasseur. Il avait vraiment marre de manger toujours du bison. Sa famille
en cœur proclama "on veut des œufs, on veut des œufs ". Il se
rapprocha alors de celui qui volait des œufs dans les nids... Ils calculèrent
chacun de leur coté le nombre de jours de travail que représentaient leurs
productions. Ils comptaient en journées (Une journée de l'un = une journée de
l'autre, disait-on à cette époque). Un bison c'était 2 jours de travail à 3
personnes dit le chasseur. Le cueilleur d’œufs estima qu'il lui fallait 1
journée pour ramener 6 mains d’œufs (30 œufs).
Après moult
palabres ils se mirent d'accord sur le fait qu'un bison valait 36 mains d’œufs
(N.D.L.R: Une main comportant 5 doigts, on disait en ce temps non pas 36 mains
d’œufs mais "7 mains de mains et un doigt de main d’œufs". Mais nous
simplifierons, parce que le lecteur d'aujourd'hui n'a plus les facultés de calcul
mental pseudo-quinquadécimal de l'homme de Tautavel)...
Ainsi quand le cueilleur n'avait que 18 mains d’œufs, il les échangeait contre
un demi-bison.
Le chasseur
avait mal aux pieds, à parcourir des trajets harassants à la poursuite des
bisons en pleine savane. Il alla voir
"celui-qui-fait-des-gants-pour-les-pieds". C'était un artisan habile
qui fabriquait des mocassins rudimentaires en peau de bison.
Celui-ci lui dit
que, outre 4 coudées carrées de peau de bison pour fabriquer les
gants-pour-les-pieds, il avait besoin pour rémunérer son travail de Huit
poulets...
Bien embêté,
notre chasseur, alla voir celui qui gardait des poulets dans un enclos.
Celui-ci était d'accord pour lui fournir la volaille moyennant une rétribution
de 6 mains d’œufs par poulet adulte...
Hélas, notre
chasseur n'était pas mathématicien et la calculette n'était pas encore
inventée...
Jusqu'au jour où
un pique-assiette passa par là et fit cet étrange marché avec nos producteurs
préhistoriques...
Il avait avec lui des coquillages. Personne ne connaissait cela à l'intérieur des terres...
Il avait avec lui des coquillages. Personne ne connaissait cela à l'intérieur des terres...
Il dit :
"Le bison vaut 36 mains de coquillage, l’œuf vaut un coquillage, le poulet
vaut 6 mains de coquillages, la coudée carrée de peau de bison vaut 6 mains de
coquillages et la paire de gants-pour-les-pieds vaut 14 mains de coquillages
plus deux coquillages". Ainsi parla le pique-assiette au temps des âges
farouches... Il leur fournit les coquillages moyennant rétribution à crédit
garantie par une hypothèque sur leurs cavernes, un droit de préemption sur
leurs productions, plus une commission en cash...
Ainsi la
première bulle financière apparut-t-elle au milieu des travailleurs
préhistoriques. Le nouveau venu était bien décidé à jouer de ces équivalents
arbitraires entre du vrai travail et des coquilles sans valeur et de faire
converger vers lui les vraies valeurs acquises à la sueur des autres sans
aucune peine que de jouer de la crédulité des travailleurs...
La devise était
née sur les cendres du troc qui disparaissait pour longtemps...
L'histoire retiendra
que ce jour-là, le premier escroc était né. On l'appelait le capitaliste...
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