mercredi 11 novembre 2015

Mémoires et radotages (21) – Le courage



Oui, j’ai eu peur… Parce que le courage n’est pas éternel ! Il n’y a pas que des hommes lâches et des hommes courageux… Ce serait trop manichéen ! Il y a aussi des gens qui ont eu du courage dans certaines circonstances et n’en ont pas eu dans d’autres, à certaines époques et pas à d’autres… Le courage n’est pas un acquis… Cela se mérite chaque jour…

C’est comme le vertige… J’ai connu un gars qui installait des échafaudages, perché tout en haut, posé d’un pied et accroché d’une main… jusqu’au jour où je l’ai trouvé au pied de l’échafaudage : C’est lui qui accrochait les tubes au bout de la corde… Le vertige était venu d’un coup, un jour… Et le vertige, qu’est-ce, sinon de la peur que l’on ne peut raisonner, irrépressible… La terreur, les tremblements, les suées froides, le blocage complet comme tétanisé…

Comme je le comprends ce gus ! J’ai vécu la même chose… Comment ai-je pu aller faire le singe à des hauteurs pareilles sur des bouts de tubes brinquebalants ? Comment ai-je pu sauter par la portière d’un avion ? Comment ai-je pu imposer ma loi à une bande de nègres qui ne rêvaient que de me faire la peau ? Comment ai-je pu mater des mecs comme des armoires à glaces sur les chantiers ? Fallait-il que je sois fou, inconscient, téméraire ?

Non, en y réfléchissant bien, je n’étais pas inconscient ni téméraire… J’avais peur mais, j’évaluais les risques, je mettais au point les actions que j’allais mener, je me préparais à contrôler ma peur, puis je contrôlais ma peur, le moment venu… Je me maîtrisais… Je déployais ma volonté plein pot, comme un forcené… Ma force était dans ma voix, dans mon ton, dans la justesse de mon combat, dans ma précision, fut-ce au fusil mitrailleur… En fait tout venait de mon cerveau ! Je serai le plus fort parce que c’est moi ou l’autre… Je serai le plus fort parce qu’il en va de mon emploi… Je serai le plus fort, parce qu’il en va de ma crédibilité…

C’était le bon temps, quoi !... Et… le bon temps, c’est fini… Maintenant, je commence à avoir peur et à savoir que je ne saurais plus contrôler la situation… On ne peut pas être et avoir été… Pourtant, j’aimerais avoir encore du courage…
Parce que, non seulement on sait que l’on a plus les moyens de contrôler les situations qui se présenteraient (force, vivacité d’esprit, etc.…), mais en plus on n’a plus la maîtrise de notre volonté, de notre courage… Tout fout le camp !

Et le pire c’est que cette chute est rapide, beaucoup trop rapide…

Bordel ! Ça fait chier de vieillir ! Merde !

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