Oui,
j’ai eu peur… Parce que le courage n’est pas éternel ! Il n’y a pas que
des hommes lâches et des hommes courageux… Ce serait trop manichéen ! Il y
a aussi des gens qui ont eu du courage dans certaines circonstances et n’en ont
pas eu dans d’autres, à certaines époques et pas à d’autres… Le courage n’est
pas un acquis… Cela se mérite chaque jour…
C’est
comme le vertige… J’ai connu un gars qui installait des échafaudages, perché
tout en haut, posé d’un pied et accroché d’une main… jusqu’au jour où je l’ai
trouvé au pied de l’échafaudage : C’est lui qui accrochait les tubes au
bout de la corde… Le vertige était venu d’un coup, un jour… Et le vertige,
qu’est-ce, sinon de la peur que l’on ne peut raisonner, irrépressible… La
terreur, les tremblements, les suées froides, le blocage complet comme
tétanisé…
Comme
je le comprends ce gus ! J’ai vécu la même chose… Comment ai-je pu aller
faire le singe à des hauteurs pareilles sur des bouts de tubes
brinquebalants ? Comment ai-je pu sauter par la portière d’un avion ?
Comment ai-je pu imposer ma loi à une bande de nègres qui ne rêvaient que de me
faire la peau ? Comment ai-je pu mater des mecs comme des armoires à
glaces sur les chantiers ? Fallait-il que je sois fou, inconscient,
téméraire ?
Non,
en y réfléchissant bien, je n’étais pas inconscient ni téméraire… J’avais peur
mais, j’évaluais les risques, je mettais au point les actions que j’allais
mener, je me préparais à contrôler ma peur, puis je contrôlais ma peur, le
moment venu… Je me maîtrisais… Je déployais ma volonté plein pot, comme un
forcené… Ma force était dans ma voix, dans mon ton, dans la justesse de mon
combat, dans ma précision, fut-ce au fusil mitrailleur… En fait tout venait de
mon cerveau ! Je serai le plus fort parce que c’est moi ou l’autre… Je
serai le plus fort parce qu’il en va de mon emploi… Je serai le plus fort,
parce qu’il en va de ma crédibilité…
C’était
le bon temps, quoi !... Et… le bon temps, c’est fini… Maintenant, je
commence à avoir peur et à savoir que je ne saurais plus contrôler la
situation… On ne peut pas être et avoir été… Pourtant, j’aimerais avoir encore
du courage…
Parce
que, non seulement on sait que l’on a plus les moyens de contrôler les
situations qui se présenteraient (force, vivacité d’esprit, etc.…), mais en
plus on n’a plus la maîtrise de notre volonté, de notre courage… Tout fout le
camp !
Et
le pire c’est que cette chute est rapide, beaucoup trop rapide…
Bordel !
Ça fait chier de vieillir ! Merde !
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